Les récits des civils ont attiré notre attention sur un accident de deux forteresses volantes qui serait survenu début septembre 1944 au-dessus de Dives et Cabourg.
Marie (18 ans en 1944) se souvient de deux forteresses volantes qu’elle a vu se percuter après son retour d'exode au-dessus de Dives-Cabourg :
"Après notre retour, j’ai assisté à un accident de deux avions alliés qui se sont télescopés au-dessus de Cabourg. Je revenais de travailler de chez le dentiste.
C’étaient des avions alliés à double fuselage qui revenaient vers l’Angleterre. Ils se sont cognés et ça a fait un raffut ! J’ai eu peur, je suis rentrée à la maison, il y avait des débris jusque dans le jardin. Ce jour-là, un espagnol a été tué et le fils Cavalca qui se prénommait Dante, a été grièvement blessé".
Les rapports de l’époque de l’aviation américaine qui nous ont été communiqués et les décès enregistrés dans les registres municipaux des deux communes confirment cet accident. La collision qui a eu lieu à Dives le 1er septembre 1944 à 11h59 à 18 000 pieds, impliquait deux B-17. Les deux appareils appartenaient à : 849th Bomb Squadron, 490th Bomb Group, 3rd Bomb division, 8th Air Force (USA). Ils décollaient de la station 134 Eye, Suffolk en Angleterre. Leur mission était de bombarder Ludwigshafen et ses usines chimiques en Allemagne. La mission fut annulée en route pour cause de mauvais temps.
Les équipages étaient constitués de 10 personnes par appareil. Il y a eu 3 survivants dans l’un des deux bombardiers. L’accident a également provoqué des victimes civiles.
Le Major Lamont d'Haas, membre d'équipage d'une des forteresses volantes qui sont entrées en collision le 1er septembre 1944, ne devait pas participer à ce vol mais il remplaçait un malade. Il est décédé dans cet accident.
En 2009, une valise remplie de lettres adressées à sa femme Lou a été retrouvée par Robert T Smith et elle a été restituée en 2014 à sa famille.
« Nous quittions juste les côtes de France. Je conduisais la patrouille. J’ai vu un appareil passer légèrement sous l’autre. Quelques secondes plus tard, il est remonté et a percuté. Les deux appareils se sont brisés et sont tombés.
Un des membres de l’équipage à l’arrière a vu 4 parachutes s’ouvrir et plusieurs corps tomber en chute libre. Puis il les perdit de vue à cause des nuages »
Lieutenant Vincent Bullard
Extrait du rapport de l'accident du 1er septembre 1944 :
« J’ai vu sur notre droite, l’avion de tête qui semblait se rapprocher par en-dessous de notre aile droite et il l’a percutée avec la queue de l’appareil. Nous étions environ à 16.000 pieds lors de la collision. Au moment du choc, j’ai vu le copilote, le lieutenant Russel projeté vers la queue de l’appareil et au même moment, je me suis retrouvé au plafond sans pouvoir rien faire. Je suis retombé et j’ai pu attraper mon parachute. Il m’a alors semblé que l’appareil se brisait en deux et je fus éjecté.
Après l’ouverture de mon parachute, j’ai vu la partie arrière de l’appareil tomber avec la queue dirigée vers le haut. J’ai entendu des bombes exploser et j’ai vu des morceaux de l’avion brûler au sol, mais je ne sais pas de quel appareil ils provenaient. J’ai également vu un parachute, cela devait être celui du sergent Oren Simpson car il a atterri près de moi.
Les officiers français de la marine parlaient anglais, ils m’ont dit qu’un de nos compagnons était dans un petit hôpital français (à Cabourg). Je suis allé le voir, c’était le sergent Oren Simpson, un des membres de notre équipage. Il avait une blessure à la tête qui a nécessité 6 à 8 points de suture… »
« Je peux seulement me souvenir d’un grand bruit et j’ai perdu connaissance. J’ai repris connaissance après avoir chuté de 10. 000 pieds. J’ai tiré sur la poignée de commande et mon parachute s’est ouvert. Je me suis rendu compte que j’avais le dos cassé, des blessures à la tête et aux mains. J’ai tout de suite regardé si je voyais d’autres parachutes en l’air autour de moi mais je n’ai rien vu. J’ai à nouveau perdu connaissance à environ 4.000 à 2.000 pieds du sol. Je ne sais pas quand j’ai atterri et je ne me suis réveillé qu’après que des civils français m’aient enlevé mon harnais et m’aient allongé sur le sol ; Ils étaient cinq. J’ai tout de suite demandé s’ils avaient vu d’autres parachutes, ils m’ont répondu qu’ils en avaient vu cinq dans ce petit chemin. J’ai atterri au nord de Caen, près de Deauville . Des soldats canadiens m’ont emmené dans leur ambulance vers l’hôpital français de Deauville. »
John a ensuite été transféré dans un hôpital de campagne canadien puis en Angleterre où il est resté jusqu’en janvier 1945.
Documents et témoignages collectés et traduits par Christine Le Callonec
"Début septembre 44, il y a eu des avions qui rentraient de bombarder l’Allemagne. Ils volaient les uns au dessus des autres, il y a eu un trou d’air et l’un d’entre eux est tombé et il a touché celui du dessous. Les avions, un ou deux, enfin au moins un est tombé. C’était vers 12 heures. On a vu tomber les morceaux. Il y avait un pilote Américain dont je me rappelle encore du nom, Pulver Francis qui avait 36 ans qui est tombé dans un jardin dans le cottage divais. Bien évidemment il hurlait, je n’y étais pas c’est les gens qui racontaient, il demandait à mourir tellement qu’il souffrait. Un autre morceau était tombé à Cabourg juste en face du trottoir qui mène vers la route de Franceville, sur le trottoir face à l’église. Nous sommes allés voir bien sûr ...
Nous sommes allés à l’inhumation de ce pauvre pilote qui a eu lieu dans l’église de Dives sur Mer deux jours après, il y avait une foule considérable. C’était un fait divers tragique. Un des aviateurs est tombé sur la plage, il a été sauvé mais il était dans un champ de mines, il a fallu qu’il attende la marée haute pour qu’on puisse venir le chercher. Il a raconté toute sa vie, ils avaient fait le Japon avec cet avion-là, ils avaient été dans tous les coins du monde, ils avaient échappé à des DCA et tout ça. Pour une histoire de trou d’air, il avait perdu ses copains, il était tout seul ..."
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