Les cadavres de 28 résistants et patriotes furent découverts à Saint-Pierre-du-Jonquet entre septembre et novembre 1946. Le premier fut retrouvé dans le bois début septembre 1944, puis ce furent six nouveaux corps dans l’eau boueuse d’un trou de bombe. Le 15 novembre 1946, vingt-et-un corps sont mis à jour.
Ces 28 hommes, pour la plupart des résistants, ont trouvé la mort dans un petit bois du village, une zone interdite par les Allemands. Le 9 juillet 1944, ils ont été lâchement torturés, achevés d'une balle dans la nuque et jetés dans un trou de bombe. À ce jour, 11 victimes n'ont pas encore été identifiées.
Depuis 1957, une cérémonie est organisée à Saint-Pierre-du-Jonquet le dimanche qui suit le 11 novembre pour honorer leur mémoire.
Dans la nuit du 5 au 6 juin les paras britanniques et canadiens qui ont sauté dans les marais entre Dives et Varaville, sont activement recherchés et, bien souvent, exécutés par les troupes d’occupation. Malgré tout, des hommes et des femmes risquent le pire en les recueillant et en les aidant à rejoindre leurs lignes.
Début juillet 1944, la Gestapo d’Argences opère une grande rafle dans le secteur de Dives, du bas-Cabourg et du marais de Varaville. Hommes et femmes sont brutalement arrêtés, enlevés à leur famille et emmenés vers Glanville et la prison de Pont-l'Évêque où les attendent leurs tortionnaires. Les hommes sont emmenés à Argences où ils sont interrogés avant d'être emmenés vers une destination inconnue. Les femmes sont relâchées quelques jours plus tard sans nouvelles de leur mari.
Dans le secteur de Ouistreham à Honfleur, d'autres arrestations interviennent également.
Les corps de 7 suppliciés sont retrouvés en septembre 1944 dans un trou de bombe, dans les bois de Saint-Pierre-du-Jonquet, près d’Argences, en zone interdite, à cause d’un site de lancement de V1 dont la construction ne fut jamais achevée. Ce n'est que deux ans plus tard, en novembre 1946, que 21 corps sont à nouveau mis à jour dans cette même zone.
À ce jour, seuls 17 corps sont identifiés de manière formelle. Les 11 autres victimes n’ont pas été formellement reconnues. Les corps ont été inhumés sous 11 dalles blanches, au pied de l’église de Saint-Pierre-du-Jonquet.
LISTE DES VICTIMES IDENTIFIEES
Le docteur Martin de Troarn a établi une première liste en 1946
On recense huit habitants de Dives-sur-Mer :
- Jacques BIMONT, directeur du Centre de jeunesse de Dives
et deux élèves du centre : Jean KIELICHOWSKI, Stephan KOPCIARA ;
- Yves DIVERRES, et Pierre LE CUNFF, tous deux gendarmes retraités,
employés comme gardiens à l’usine de Dives ;
- Stanislas LUDWICZAK, électricien à l’usine de Dives ;
- l’abbé Jacques LECLERC, vicaire de Dives,
accusé d’avoir caché des parachutistes alliés dans le clocher de l'église
- Fernand MANNOURY, employé SNCF à la gare de Dives
mais aussi :
- Maurice DUVAL et Adrien VERMUGHEN de Cabourg
- Bernard LEFEVRE de Varaville
- Léon POUCHIN de Villers-sur-Mer
- André GARDY de Beuvillers
- Jean-Marie PASSOT et Maurice SERRE de Colombelles - Jean ROGER de Giberville
- Marcel CATHERINE de Paris
Les restes de ces résistants, lâchement assassinés par la Gestapo, ont été ré-inhumés, parmi les leurs.
Sur les 28 victimes, onze n’ont pas été identifiées formellement, mais de nombreux indices ont permis à Yves Lecouturier, historien et auteur du livre « Massacre à Saint-Pierre-du-Jonquet, qui nous a quitté en 2023, d’établir une liste de 8 noms d’hommes qui font très vraisemblablement partie des victimes.
Marcel DOISY de Dives-sur-Mer
Pierre BAUDRON de Cricqueville-en-Auge
Michel GOLINSKI de Colombelles
Georges LEBRUN de Ouistreham
André MULOT d'Honfleur
Fernand SERVANTI de Cabourg
Christian WANDER de Cabourg
Michel WANDER de Cabourg
On peut ajouter Gilbert DILLARD d'Evreux
Dans un document accompagnant une liste de noms de personnes emprisonnées à Pont-l'Évêque de mai 1942 à juillet 1944, il est fait mention de la présence d'un graffiti sur les murs de la prison.
"La mort sera ma délivrance" signé Gilbert Dillard
Les recherches menées au Service Historique de la Défense à Caen permettent de retracer les conditions de son arrestation.
Début juin 1944, Gilbert Dillard était parti d'Evreux pour tenter de rejoindre les troupes alliées auxquelles appartenaient son père, contre-amiral et son frère. Il a été arrêté et emprisonné à Pont-L'Évêque avant d'être emmené à Argences où il a été interrogé par la Gestapo. Un témoin précise qu'il l'a vu partir dans une voiture noire dans laquelle se trouvait Adrien Vermughen et les deux frères Wander.
Il fait partie, selon toute vraisemblance, des victimes non identifiées de Sant-Pierre-du-Jonquet.
Recherches Christine Le Callonec - 2024
En septembre 2024, un panneau a été installé par la mairie de Saint-Pierre-du-Jonquet dans le carré militaire du cimetière,
où reposent les corps des 11 victimes non identifiées formellement.
Saint-Pierre-du-Jonquet, le 17 Septembre 1944
« Une habitante de Saint-Pierre-du-Jonquet, à la recherche de ses objets perdus, en longeant le bois de Rupière s'arrête devant un trou de bombe d'environ quatre ou cinq mètres de profondeur en lisière du bois. Elle donne l'alerte. Le lendemain les autorités sont venues et ont fait retirer six corps qu'ils ont déposés au bord de ce trou. Ces corps avaient séjourné là au moins deux mois en plein air, dans un trou à moitié rempli d'eau limpide, ce qui lui a permis de bien distinguer des corps au fond.
Je me souviens du trou qu'ils avaient à la tempe et les trois ou quatre tours de cordelette aux poignets. Certains avaient une importante barbe. Je dois signaler que ces six corps ont été retirés de ce charnier par cinq prisonniers allemands qui étaient employés chez des agriculteurs avoisinants : messieurs Béziere, Barbey et des “bénévoles” dont je faisais partie.
Beaucoup de personnes assistaient à cette macabre besogne dont les familles des disparus, les habitants des environs proches... la police, le Parquet..., mais très peu d’aide !!!! Nous disposions les corps dans des toiles à marc : il était impossible de faire autrement. Nous les chargions dans une charrette pour les emmener jusqu'au cimetière de Saint-Pierre-du-Jonquet et les déposer devant l'église où les familles sont venues pendant plusieurs jours pour tenter de reconnaître leur disparu... Une première cérémonie fut célébrée en présence d'une foule considérable. »
« Je me souviens » G. Le Baron – 17 ans en 1944
Le monument, dessiné par le sculpteur Gérard Laugeois, a été inauguré en 1957.
La rafle du cottage divais par Marcel Vauvarin de Dives-sur-Mer
"Je l’ai vécue … mon père et moi, nous y avons échappé !
Notre maison avait pris des éclats d’obus et ma sœur avait un peu peur si bien que nous étions allés loger chez Mannoury dans le cottage. Nous nous rendions le soir, mon père ma mère, ma sœur et moi, pour dormir au sous-sol de sa maison. Un jour on entend des bruits de voix et ce n’était pas du français. Mon père a dit : « ce n’est pas possible que ce soit des Allemands chez Mannoury ». Nous avons continué à venir le soir et un jour, Mannoury est descendu nous voir et nous dit qu’il avait deux Anglais dans sa maison « Venez, vous allez faire connaissance ». Cela a duré deux ou trois soirs et puis plus personne, ils ont pu traverser les lignes.
Quelques jours plus tard… La maison donnait à l’arrière sur le jardin et des prairies. Par la fenêtre, nous avons vu des Allemands arriver avec un chien, un peu plus tard, ils ont frappé à la porte, forcé l’entrée. Un officier qui parlait très bien français nous a interrogés. Ils nous ont emmenés en voiture, Mannoury et sa femme, mon père et moi jusqu’au bout de la rue, en face de la sécurité sociale, là où habitaient Le Cunff et Diverres. Il y avait déjà des Allemands, ils ont fouillé deux maisons, cela a duré peut-être une heure. Puis ils nous ont ramenés chez Mannoury, nous ont interrogés encore une fois et ils nous ont laissés papa et moi. Ils avaient vu notre literie en bas, et on leur a expliqué qu’on dormait seulement. Ils nous ont laissés et emmené Mannoury.
On ne l’a jamais revu. Les Allemands étaient bien informés, ils avaient la liste des personnes à arrêter avec leurs adresses précises."
Collection privée Frédérique Houssemaine
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"Un fleuve pour la liberté, la Dives"
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