On compte une vingtaine de victimes civiles à Dives-sur-mer entre le 6 juin et l'évacuation ordonnée par les Allemands le 17 juillet 1944. Ces décès qui touchent des familles entières sont provoqués par la chute d'un avion anglais, des bombes lâchées d'un avion allemand poursuivi par la RAF et des mitraillages.
Le 4 juillet, la Gestapo fait une descente dans le cottage et arrête des résistants soupçonnés d'avoir caché des parachutistes anglais.
Le 12 juillet, le Conseil municipal prend acte de l'ordre d'évacuation qui doit être effectif au plus tard le 17 juillet.
Les Belges de la Brigade Piron, arrivés à Cabourg le 21 août, pénètrent dans une ville déserte après avoir traversé la Dives sur des embarcations prêtées par des pêcheurs.
"Dans la nuit du 5 au 6 juin, il y avait, au dessus de nos têtes, les projecteurs, la DCA et les obus de marine. Comme la maison tremblait, on est allés dans un fossé du champ à Brière avec la famille Schenck, derrière les cités, et on a vu les parachutistes anglais tomber à trente mètres de nous. Ils étaient perdus. Le Sergent a embrassé ma mère. On a emmené les sept parachutistes dans les cités vertes qui n’étaient pas terminées, puis dans le moulin avant que Ludwiczak ne les prenne en charge dans le Cottage divais pour les conduire sur Cabourg."
Albert Crief
"Un parachutiste est tombé dans mes petits pois !"
Marguerite Jean
"Le jour du Débarquement, on était là. Par la fenêtre on a vu un avion tomber sur la côte de Sarlabot, on aurait dit que toute la colline était en feu, ça faisait un brasier ! Mon frère aîné a dû aller voir, mais on n’avait pas le droit d’approcher. Qu’est-ce qu’elle était belle la colline pendant la guerre ! Les avions déchargeaient leurs bombes sur Tournebride, on voyait les chapelets de bombes tomber et on se disait attention, ça va faire du bruit !"
Yvonne Jean
L'avion tombé chemin du Petit Pavé était le Stirling EF268 dont l'accident avait été initialement localisé près de la Batterie d'Houlgate. Des échanges avec un Canadien ont permis de localiser le lieu du crash sur Dives.
Les 6 membres d'équipage et les 20 soldats alliés sont morts dans l'accident. D'abord enterrés sur place, les corps ont été relevés en 1945. Ils reposent au cimetière de Douvres-la Délivrande.
"Un avion anglais pris en chasse est tombé entre le garage Renault et la « Goutte de lait » (les mères allaient y faire peser les petits), à côté du restaurant « Le Coq Hardi ». Les parents d’Alfred Lasica ont été tués dans ce crash. J’étais allé voir avec ma sœur, on a vu le pilote anglais qui était en train de brûler. Cette vision m’a longtemps poursuivi."
Robert Ledorze
"J’avais pris des cours de secourisme avec le docteur Heurtot, nous étions très peu à avoir pris des cours chez lui. Il nous a appris à nous débrouiller avec rien en cas d’urgence, à faire un garrot avec un bouchon de liège taillé et un mouchoir ou un brancard avec des manches à balai et un vêtement …
Malheureusement, on ne pensait pas que ça allait servir !
Le premier blessé que j’ai vu, il avait le thorax ouvert, une image qui m’a frappée à jamais …
Il y a eu un bombardement en juin 1944, un avion anglais est tombé sur la maison de Lasica, rue Georges Landry, tout près de la Goutte de lait. Le père a été tué et Lasica a tiré la mère hors du feu, tous deux étaient très brûlés, Alfred Lasica avait une quinzaine d’années, il était en culottes courtes, et il a eu les jambes brûlées, il n’avait plus de lèvres, les oreilles décollées…
Les premiers blessés avaient été emmenés au dispensaire de l’usine. L’usine était fermée mais le dispensaire restait ouvert. Mlle Blavette ne pouvait pas les accueillir, l’infirmerie ne suffisait plus. Nous avons emmené les brûlés au village Guillaume le Conquérant, dans une chambre juste au-dessus du porche d’entrée, et on nous a demandé à Denise Fiant et à moi, les deux seules qui étaient restées, de nous en occuper. C’était la première fois, c’était dur, il fallait s’accrocher mais mademoiselle Blavette nous disait « allez les filles, il faut le faire ». Je n’étais pas habituée."
Marcelle Henri née Adrien
Le 08 juin 1944, le Flight Sergeant Gheysens est aux commandes de son Spitfire IX MK252 lorsqu'il est abattu en combat aérien par un chasseur près de la tête de pont de Dives-sur-Mer dans le Calvados. Son nom figure au Maidenhaed Register dans le Berkshire en Angleterre.
Arrêté en 1940, puis rapatrié, il est arrêté à nouveau le 7 juin 1942 et interné à la Citadelle de Huy jusqu'au 6 novembre. Il est reconnu comme "résistant armé" à l'Armée Secrète depuis le 1er juillet 1941. Gheysens figure parmi les 275 évadés qui ont été aidés par un réseau Comète qui a permis à de nombreux aviateurs à rejoindre l'Angleterre.
Jean-Louis Gheysens fut d’abord inhumé à Dives-sur-Mer avant que son corps ne soit rapatrié en Belgique en 1950. Il repose désormais au cimetière communal de Nieuwpoort / Nieuport, en Flandre Occidentale.
Plus d'info sur le site du Réseau Comète
" J’avais douze ans et demi : l’événement du 11 juin 1944 fut le bombardement de notre maison, située au 6, rue du Château d’eau ; c’est un pavillon appartenant à l’usine Cégédur qui abritait quatre ménages sur ses quatre faces : deux face aux 6 et 8 rue du Château d’eau et deux autres face aux 5 et 7 rue Saint-Éloi. Ce jour-là, une bombe est tombée dans le jardin, soufflant toute la façade de la maison située sur la rue Saint-Éloi. On pouvait découvrir l’intérieur : cuisine, salle, chambre ...
Les faits : il était environ 11 h du matin. Comme nous avions un petit élevage de lapins, mon père m’a demandé d’aller chercher de l’herbe pour les lapins dans le Cottage divais qui se trouvait tout proche de la maison et du canal qui nous séparait. J’étais arrivé à cent mètres de la maison, juste avant de traverser le pont du canal, lorsque j’ai entendu des bruits de moteur d’avion venant de la mer, au nord et au-dessus de l’usine, à environ 2 km à vol d’oiseau et à très basse altitude, ce qui m’a interrogé. J’ai aperçu alors une petite masse sous l’avion qui me faisait penser à un parachute, j’ai donc suivi la trajectoire rapidement, car elle se dirigeait sur moi et là, j’ai nettement vu cette masse qui est passée à environ une centaine de mètres au-dessus de ma tête, légèrement décalée. J’ai réalisé alors qu’il s’agissait d’une torpille, car il y avait des ailettes, et j’ai vu une croix gammée sur l’avion. J’ai compris que c’était un chasseur allemand poursuivi par des avions alliés, et qu’il venait de se débarrasser de ses bombes afin d’aller plus vite. ..."
Robert Richard
"11 H 5 La boutique était pleine de monde. Un avion passe à ras des toits – quelques secondes – un fracas formidable – la glace de la boutique, côté cuve, tombe – nous nous rassemblons dans la salle puis sortons. L’avion allemand ( ?) poursuivi par des Anglais a lâché une bombe à 50 m d’ici sur un pavillon des Cités. Les secours arrivent aussitôt. La famille Audrieu, 5 personnes, tous tués – deux hommes qui passaient dans la rue, tués – des femmes blessées. Chez Goubin, un bébé et un jeune homme, tués – autres membres de la famille, tués. Total, 14 morts et 5 ou 6 blessés. Les jeunes de la Défense Passive ont tous fait de leur mieux et rapidement déblayé et retiré les victimes."
Journal de Fernande Aveline
Au début du mois de juillet 1944, la Gestapo mène une vague d'arrestations dans un quartier pavillonnaire, le cottage de Dives-sur-mer, chez des habitants soupçonnés d'avoir caché des parachutistes. Les femmes sont relâchées les jours suivants mais les corps de huit habitants de Dives ont été identifiés parmi les victimes retrouvées en septembre 1944 et novembre 1946 à Saint-Pierre-du-Jonquet.
Les corps des 8 Divais ont été ramenés au cimetière de Dives le 22 novembre 1946, lors d'une cérémonie très émouvante.
"En juillet 1944, nous avons vécu un drame, mon frère Stephan qui n’avait pas encore 18 ans a été arrêté par les Allemands. Ils l’ont pris alors qu’il était dans la cour, ma mère ne voulait pas que les Allemands l’emmènent, elle s’est accrochée à lui et ils l’ont tapée. Il n’est pas revenu, quand il a fallu évacuer Dives, nous sommes allés sur la côte de Sarlabot, ma mère descendait à la maison pour voir s’il n’avait pas été relâché. On ne l’a jamais revu, il a fait partie des fusillés de Saint-Pierre-du-Jonquet."
Sophie Wursteisen née Kopciara
" Stanislas a été arrêté chez lui par les Allemands qui ont fait une rafle dans le quartier du Cottage Divais, arrêtant également Mannoury et Yves Diverres qui habitaient dans le quartier et les femmes. Ma grand-mère a été arrêtée ainsi que Mmes Le Cunff et Diverres. Les Allemands les ont tous emmenés, seules les femmes ont été relâchées. Dans la prison, les femmes entendaient quand les hommes étaient tabassés, madame Diverres m’a raconté que c’était encore plus dur pour ma grand-mère, car pour elle, c’était son fils, elle disait « tuez-moi mais laissez-moi mon fils, il est jeune »."
Christiane David née Ludwiczak
"Nous sommes partis à pied avec du matériel, des provisions et du linge. Mon père avait un vélo d’homme et les valises étaient fixées sur la barre. Mon frère et moi, nous avions une musette avec un morceau de pain et une bouteille. Nous sommes partis par la route de Lisieux, je me souviens avoir dû aider ma mère à pousser le vélo dans la côte. Arrivés à Annebault, un accueil était organisé, des paysans avaient prêté des bâtiments. La femme d’un fermier avait fait bouillir du lait et en offrait aux enfants, le lait avait brûlé et avait mauvais goût. Nous avons logé dans les granges par terre."
Maria Legrand née Zarinski
"Nous avons pris la RN 13 Caen-Paris à l'Hostellerie.. Nous avions fait environ 2 km lorsqu'un avion à très basse altitude arrive vers les charrettes, nous entendons le crépitement des mitrailleuses et heureusement le pilote a bien réagi au moment de déclencher le tir. Il a remarqué que les passagers des charrettes étaient des civils et les balles sont passées au-dessus de nous. Un deuxième avion surgit comme le premier. Malheureusement, car le bilan est lourd dans notre charrette : 2 morts et 2 blessés dont je fais partie.
Ma sœur Léone, 11 ans a reçu une balle explosive à l’épaule droite. J’ai encore la vision de notre mère nous récupérant. Ma sœur assise devant moi paraissait encore en vie. Lorsqu’elle l’a prise par le bras gauche pour la relever, le bras lui est resté dans les mains. Quelles images pour un enfant de 7 ans ½. J’en ai fait des cauchemars pendant des années !"
René Lesueur
Un soldat belge de la Brigade Piron raconte :
« Ordre nous vient : il faut que nous passions la Dives : j’aperçois une barque sur l’autre rive. Hélas la marée est basse et ce n’est qu’un filet d’eau qui coule, le reste de la vase noire. Enfin, n’y aura-t-il personne pour se dévouer ? Zut, j’y vais, on verra bien, cela va… pas trop, car avant d’atteindre le milieu j’enfonce jusqu’à mi-corps; il est temps de me jeter une corde que je réussis à attraper, sinon je n’écrirais pas ces lignes aujourd’hui »
Pierre Dufrane – Sergent de la Brigade Piron
Un témoin raconte :
En Juillet 1944, nous sommes restés tout seuls à Dives quand il y a eu l’ordre d’évacuation pour la population car mon père travaillait pour les Chemins de fer.
Mon père avait cueilli des fleurs dans le jardin et comme j’étais la plus jeune fille, j’avais 17 ans, j’ai offert un bouquet de dahlias au premier Belge qui est passé le matin du 21 août. Le pont était par terre, Les soldats passaient sur les morceaux, un gars Legoff ou Panpin, je ne sais plus le nom, avait une barque et il a traversé. Les Belges ont ramené leur matériel et ils ont remonté un pont Bailey vite fait !
Hélène Denou née Lemesle
Mimi Guilham est institutrice à Dives-sur-mer, en août 1943, elle accompagne une trentaine d'enfants pour une colonie qui ne devait durer qu'un mois. A la rentrée, la municipalité lui demande de prolonger le séjour pour garder les enfants en sécurité. Elle fait donc la classe à Fierville pendant une année. Après le débarquement, les enfants seront évacués vers Chambois... et reviendront tous sains et saufs en octobre 1944. De juin à fin août, 1944, ne pouvant plus échanger par courrier avec son fiancé Robert, Mimi tient un journal dans lequel elle note ses déplacements, ses impressions, ses angoisses …
Le Caporal Wright, Sydney Francis est décédé le 24 Juin 1944 à 29 ans.
Il est mort lors du naufrage du Derrycunihy devant Ouistreham.
Sydney Francis WRIGHT servait au 43ème Régiment de Reconnaissance, Royal Armoured Corps (2/5 Bn the Gloucestershire Regiment ). Il est le fils de Mr et Mme W.S. Wright, et beau fils de Mr F.O. Russell, et marié à Doris Wright, de Peaceheaven, Sussex (commune littorale situé à l’est de Brighton). Son régiment, embarqué sur un cargo codifié T72, le MV Derrycunihy, devait débarquer le 20 Juin au soir sur Sword. A cause d’une forte mer, le cargo ne sera pas débarqué et attendra trois jours sur place. Le 24 juin au matin, par beau temps, il lève l’ancre pour rejoindre Juno. Il heurtera en route une mine marine qui le fera couler, tuant au passage 189 hommes du régiment et 25 membres de l’équipage, en blessant 150 de plus. Le navire sera en fait coupé en deux, la partie arrière coulant en l’espace de 20 secondes. Le corps du caporal Wright a dérivé vers Dives-sur-mer.
La plaque a été installée sur le mur à l'extérieur du cimetière de Dives le 1er juin 2019.
Place Marius Trefouel
Employé à la SNCF, Marius Trefouel était affecté à la gare de Dives-sur-mer, mais il était aussi membre du réseau Zéro France, réseau de résistance créé en Belgique et dirigé dans la région par Aimable Lepeu, pharmacien. Ce réseau pratiquait les renseignements sur les défenses côtières, l’aide aux réfractaires au STD mais aussi le sauvetage des survivants d’avions alliés abattus sur la côte. C’est ainsi que Marius Trefouel participa au sauvetage d’un pilote norvégien à la fin du mois d’Août 1943. Ce fait est confirmé par Lucien Levillain, déporté survivant de Trouville.
Il fut arrêté bien après, le 29 mars 1944, quand commença le démantèlement du réseau Zéro France, manifestement sur dénonciation, selon les documents des Archives départementales.
Déporté le 5 juin 1944, à Neuengamme près d’Hambourg, il fut transporté plus au Sud à Bergen-Belsen. C’est dans ce camp qu’il décèdera le 15 Avril 1945, le jour de la libération par les britanniques, à l’âge de 31 ans.
Notice de Claude Doktor rédigée à l’occasion du dévoilement de la plaque « Place Marius Trefouel » le 28 Avril 2013 à Dives-sur –mer, en présence de Mme Prat, fille de Marius Trefouel.
Rue Gaston Manneville
Né à Paris, le 18 avril 1892. Avant la guerre, Gaston Manneville, tenait une baraque de loterie foraine et sillonnait la Normandie. Militant communiste depuis la création du Parti en 1920, il était également vice-président national du syndicat des forains. La guerre le surprit alors qu’il avait installé sa roulotte à Dives, il fut affecté à l’usine en 1939 où il se fit remarquer très vite par sa propagande extrémiste. Dès les débuts de l’occupation, il prit la tête du mouvement de contestation, en liaison avec André Lenormand. Il participa à la distribution de tracts et mei sur pied un comité de chômeurs qui organisa plusieurs manifestations populaires devant la mairie. Au printemps 1941, il s’efforça d’empêcher la déportation autoritaire de 200 chômeurs au port de Lorient. Etroitement surveillé pour ses activités de propagande, il fut arrêté par les autorités françaises le 1er juillet 1941 par les autorités françaises et condamné à 5 ans de prison par la Cour d’Appel de Caen. Interné à la centrale de Melun puis à Compiège, Gaston Manneville fut déporté à Buchenwald en mai 1944. Rentré en France après la fin de la guerre il décéda en Octobre 1945.
Extrait de « Dives-sur-mer, une usine et des hommes » de Jean Quellien
Parc André Lenormand
Né en 1913 et fils d’un ouvrier de l’usine d’électrométallurgie de Dives, André Lenormand adhère au parti communiste dès 1930. Ouvrier peintre, il partage son temps entre Deauville et Paris où il milite au sein des jeunesses communistes.
En 1937, il travaille à la SNCF et assure le transport des tracts entre Paris et le Calvados. Il est en liaison étroite avec Gaston Manneville qui s’efforce d’organiser la Résistance au sein de la population ouvrière de Dives.
André Lenormand est arrêté le 1er juillet 1941 avec une dizaine de camarades de Dives. Traduit devant la section spéciale de la Cour d’appel de Caen, il est condamné à cinq ans pour activités communistes. Interné à Melun puis Châlons-sur-Marne, il est déporté à Buchenwald en mai 1944.
Il rentre en 1945, devient secrétaire fédéral du Parti communiste. Il sera député du Calvados de 1946 à 1958, maire de Dives de 1953 à 1983 et conseiller général du calvados de 1960 à sa mort en 1984.
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